L'intimité

C'est ce que je préfère dans la vie, je crois, l'intimité. Etre proche, être en contact, être liée. C'est encore plus magique lorsque l'intimité est spontanée, libre, évidente. Cette sensation merveilleuse d'être deux, le partage, le rapprochement, l'union profonde, quelque chose de l'ordre du bonheur. Mais, à bien y réfléchir, je pense aussi que l'intimité est dangeureuse. Elle nous met en péril, elle nous prive d'une part de mystère, elle dévoile nos ombres, elle fixe la lumière au fond de l'âme et du coeur, ces endroits sacrés qui, peut-être, ne devraient jamais, jamais, être exposés. Ces trésors enfouis ou ces monstres terrés, nos jardins secrets, l'intimité les révèle-t-elle? et ainsi, les transforme-t-elle en petits riens, un peu jolis ou un peu moches certes, mais surtout petits, donc insignifiants, presque anecdotiques, eux qui avant furent puissants et majestueux? Qui, de celui qui découvre et de celui qui est découvert peut supporter ce spectacle du rétrécissement, du passage de l'indicible au narratif ? Dans l'analyse de mon désamour pour celui qui fut mien autrefois, celui auquel j'appartenais, l'intimité occupe une place centrale. Nous partagions tout, il me disait tout, ses angoisses, ses névroses, ses psychoses. Notre proximité était devenue telle que ni lui ni moi ne pouvions la supporter davantage, nos âmes s'étaient mêlées au point de se jumeler, de devenir siamoises. On ne peut pas vivre de la sorte, de cela au moins, je suis certaine. Nos vies d'équilibristes. J'oscille, je doute, je penche d'un côté, je cherche à me recentrer, comme au yoga, à trouver la juste mesure, la posture parfaite. Celle qui accueille sans dévorer, celle qui offre sans prodigalité. Et comme au yoga, à force d'essayer, à force d'accepter l'échec comme une étape, à force de tomber et de me relever, je devrais parvenir à trouver ce moment de grâce, où tout fait sens, tout est à sa place, où l'accomplissement se produit.