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La vie à côté de soi
12 juin 2013

la solitude des chambres d'hôtel

Mon travail me conduit à voyager, tous les 2 mois au minimum, un peu partout dans le monde. Je ne suis pas très loin aujourd'hui, Marseille, c'est à côté, mais finalement, ces voyages se ressemblent tous. Il y a d'abord l'enthousiasme du départ, enfin quitter son quotidien, organiser mon départ, faire venir ma mère pour savoir ma fille en toute sécurité, négocier avec leurs angoisses , en fait, elles craignent toutes deux que mon éloignement soit définitif, peut-être par peur de ma mort, ou peut-être parce qu'elles craignent un élément indicible de ma personnalité, la part de moi qui leur échappe.
Puis enfin partir, accéder à un ailleurs, pour toujours, finir par réaliser qu'il n'y a pas d'ailleurs.
Passé l'émerveillement et la magie d'être transportée en un temps records d'un endroit connu à un nouvel univers, le soir, tard, une fois le diner entre collègues qui sont souvent des amis, fini, je me retrouve dans une chambre d'hôtel, plus ou moins luxueuse, mais finalement assez semblable. Partout à travers le monde, les standards se sont rapprochés, pour que les gens comme moi retrouvent les mêmes codes, ne soient pas surpris, ne soient pas inquiets, comme si la différence n'était plus acceptable dans notre monde global, comme si tout devait être lisse, sans angulosité, sans ride. Les télés sont toutes grandes, plates, face au lit, branchées automatiquement sur la chaine de l'hotel lorsque l'on insère la carte - clé dans l'interrupteur qui allume la chambre. Les lits ont tous au moins quatre oreillers, un sur-matelas, et des draps blancs pour en prouver le caractère immaculé. Les salles de bain sont carrelées du sol au plafond, avec des vasques design, rondes et comme en suspension ou rectangulaires et plates, incrustées dans un meuble. A côté de la télé, le petit trépied qui accueille la valise ouverte. L'unicité stylistique, inlassablement. Je le sais d'autant mieux que c'est un peu mon métier. Dans cet univers aseptisé, moi- aussi, je répète les mêmes fonctionnements, avec quelques légères variations sur le petit-dej, que je ne prends au restaurant que dans de rares endroits. J'allume la télé que je n'ai pas à la maison, je prends un long bain, ce que je ne fais jamais chez moi, je commande mon room-service pour le lendemain, 45 minutes avant l'heure à laquelle je dois être prête, je lis mes mails, j'y réponds, je regarde dehors, j'observe un monde auquel je n'appartiens pas, dans lequel je ne suis que de passage, pour un jour, deux, trois au mieux. Je zappe sur toutes les chaines, je me décide pour quelque chose que je connais déjà, je me laisse porter par la télé pour m'endormir. Je suis comme en apesanteur. Je me sens seule.

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